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Fin de la souffrance de 1 100 enfants dans les camps de réfugiés en Grèce

  • masterjpppdroitdes
  • 9 avr. 2021
  • 6 min de lecture

Publié par : Rodrigo DELGADA


Faculté de Droit Toulon


« Les souffrances des petits ne sont pas des petites souffrances. Alors, aidons-les, écoutons-les. » (Janusz Korczak)



Fin de la souffrance de 1 100 enfants dans les camps de réfugiés en Grèce


Les autorités grecques, durement touchées par la crise économique et la pandémie, ont demandé l'aide de l'Union européenne en raison de leur incapacité à faire face seule à la situation chaotique des migrants sur les îles grecques. Parmi les milliers de migrants se trouvait, depuis plusieurs mois, un important groupe de mineurs non accompagnés dans les camps de réfugiés surpeuplés de la mer Égée[1], camps où sont décédés des centaines de migrants, et notamment des enfants. Cet endroit, également appelé « première porte d'entrée des migrants en Europe », voit ses conditions sordides de surpopulation constamment dénoncées par l'Agence des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR) ainsi que par de nombreuses organisations non gouvernementales de défense des droits de l'homme[2].


Un accord européen pour les MNA


Il s'agit d'un pacte signé avec onze États de l'UE, qui a permis le transfert de 1 100 des 1 500[3] enfants. La Grèce comptait initialement 5000 MNA. L'objectif de l'accord est d'aider la Grèce avec les MNA qui vivent dans des conditions inhumaines et dégradantes. La problématique a été abordée lors d'un Conseil des ministres européens de l'intérieur qui ont fait le point sur la situation aux frontières de la Grèce.

L'opération est organisée par la Commission européenne qui joue un rôle de coordination en collaboration avec le Bureau du Secrétaire spécial pour la protection des MNA en Grèce, avec les États participants et avec la collaboration directe de l'ONU, du UNHCR, de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) et de l'UNICEF[4].

Cet accord devrait également obliger à respecter les droits des MNA dans toutes les procédures : assistance et accompagnement psychologique avec ou sans demande d'asile ; désignation d'un tuteur effectif tout au long de la procédure ; objectivité et impartialité dans la présomption de minorité au travers de tests médicaux visant à déterminer l'âge des mineurs sans papiers lorsqu'ils ne peuvent légalement prouver leur âge car il a été établi que la marge d'erreur est très élevée ; protection des données ; droit d'être entendu dans toute démarche qui les concerne et leur intérêt supérieur dans la procédure de rapatriement ; droit au regroupement familial et facilité d’accès à l'éducation et à la santé.

Ces enfants sont sous la responsabilité de tous, "c'est-à-dire qu'ils ne sont pas sous la responsabilité de l’Etat d'où ils viennent, mais de celui où ils se trouvent" et la France et les Etats de l'Union européenne en tant que signataires de la Convention des droits de l'enfant sont tenus de garantir aux mineurs une protection efficace lors de leur passage à la vie adulte.


L'obligation de l'État est d'assurer la protection et la sécurité des enfants


Face à l'écrasante pression migratoire sur les îles grecques, il a suffi d'un minimum de solidarité politique des Etats pour que les MNA bloqués puissent quitter la Grèce à destination de la France, de la Suisse, du Luxembourg, de l'Irlande, du Portugal et de l'Allemagne. Le secrétaire d'État français aux affaires européennes, Clément Beaune, a déclaré sur RTL le 23 septembre 2020 l'accueil d'un total de 500 mineurs réfugiés en Grèce. Il a d’ailleurs rappelé que "Depuis le début de l'année, en solidarité avec la Grèce, la France va accueillir 1 000 personnes, dont la moitié sont des mineurs et des familles en difficulté".

En Europe, comme l'imposent les conventions internationales, la loi protège les droits des MNA, qu'ils soient munis de documents ou non. Cependant, la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) a condamné la Grèce en juin 2019 pour le traitement humiliant et la détention irrégulière de jeunes migrants abandonnés par les institutions (CEDH, Sh. et autres c. Grèce, Autriche, Croatie, Hongrie, Macédoine du Nord, Serbie et Slovénie, n° 14165/16, arrêt de Chambre du 13 juin 2019).


Les éléments qui ont déclenché le départ des enfants des camps de réfugiés en Grèce


À la fin de 2019 et dans les premiers mois de 2020, d'organisations non gouvernementales ont tiré la sonnette d'alarme en faisant connaître aux États membres de l'Union européenne les graves violations des droits de l'homme concernant des mineurs arrivant sans parents ni représentant légal dans les camps de réfugiés des îles grecques et qui, dans leur désespoir et leur abandon, se sont tournés vers la criminalité ainsi que vers des réseaux de trafic d'êtres humains et de prostitution pour survivre et pouvoir payer leurs voyages dans un pays européen. Pour cette raison, l'Union européenne a exigé l’évacuation de ces mineurs non accompagnés[5].

Plusieurs États ont entendu le message et ont pris les premières initiatives : la Belgique, la Bulgarie, la Croatie, la Finlande, la France, l'Allemagne, l'Irlande, la Lituanie, le Luxembourg et le Portugal[6] ont accepté une délocalisation progressive.

En ce qui concerne la France, 33 MNA ont été accueillis en août 2020, 28 à Nantes et 5 à Brest[7], mais la France s'est engagée à accueillir et à installer un total de 350 mineurs en provenance des îles grecques. Après l'incendie du camp de Moria et l’adoption de mesures restrictives et controversées par le gouvernement grec pour faire face à la pandémie de Covid-19, mesures qui ont transformé ce camp de réfugiés en véritable bombe à retardement. La France a décidé d’accueillir 150 mineurs supplémentaires.


Les critères de responsabilité concernant l'examen de la demande des MNA sont définis dans le règlement Dublin III.


Le règlement Dublin III comprend des garanties qui s'appliquent à tous les mineurs soumis à la "procédure de Dublin" telles que le droit au regroupement familial, dans le respect du principe de l'intérêt supérieur de l'enfant. C'est-à-dire qu’au cours de la procédure de demande de protection internationale, les demandes des MNA doivent être examinées par l'État membre dans lequel un membre de la famille, un frère, une sœur ou un parent du mineur est légalement présent (article 8). Un représentant ou un tuteur doit leur être attribué (article 6). L'article 6, paragraphe 3, donne des indications sur la manière de déterminer l'intérêt supérieur de l'enfant. L'article 11 contient des règles visant à éviter la séparation, conformément à l'application du règlement Dublin III dans le cas de demandes séparées présentées par des membres de la famille dans le même État membre. En l'absence d'un membre de la famille, d'un frère ou d'une sœur ou d'un parent, l'État membre responsable est celui dans lequel le mineur a introduit la demande d'asile, à condition que cela soit dans l'intérêt supérieur du mineur (article 8).

Les MNA constituant une catégorie de personnes vulnérables, il n'est pas possible de prolonger la procédure de détermination de l'État membre responsable, ce qui implique, en principe, que les MNA ne soient pas transférés vers un autre État membre.





Image: https://www.croix-rouge.fr/Nos-actions/Action-sociale/Personnes-migrantes/Mineurs-isoles-etrangers



La situation des mineurs non accompagnés en France


En France, pour que les MNA soient couverts par l'aide sociale, il faut d’abord établir l'âge du mineur. Les MNA relèvent de la responsabilité de chaque département[8]. En d'autres termes, l'accueil des mineurs est réglementé par un système national d'accueil, d'évaluation et d'orientation. La procédure de l’expertise d’âge est cruciale car la situation juridique des jeunes change au moment du passage à la majorité. Cette reconnaissance peut se faire de deux manières juridiques, soit directement par les services du département, soit par le juge à la suite d'un recours introduit par les demandeurs déboutés.

Ce système est défini par la circulaire du 31 mai 2013 et sanctionné par le décret du 24 juin 2016 et est constamment soumis à des adaptations par voie législative ou réglementaire.

Le nombre de MNA en France est inconnu, d'une part président du parti Les Républicains, Christian Jacob, estime qu’un un chiffre de 40 000 MNA se trouvent sur le territoire français, mais seulement 16 760 sont concernés par le système d'aide sociale à l’enfance ASE, c'est-à-dire moins de la moitié de ces 40 000 jeunes ont effectivement été déclarés MNA[9]. À cet égard, le ministre de l'intérieur indique qu'il y a 16 000 mineurs non accompagnés en France.

Malheureusement, la réalité est qu'aujourd'hui en France, pays reconnu mondialement comme protecteur des droits de l'homme, il est fréquent de voir des MNA dans la rue, sans papiers et sans accès à la santé et à l'éducation en raison d'un système juridique complexe qui conduit ces mineurs à ne pas s'intégrer et à basculer dans la délinquance à un âge aussi précoce[10]. La France a d’ailleurs été condamnée par la CEDH pour violation de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme, estimant qu'un mineur était victime des traitements inhumains et dégradants en raison de l'omission des autorités françaises. Arrêt Kahn c. France, 28 mai 2019.

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[1] Unicef France – « Covid-19 : en Grèce, une situation critique pour les mineurs isolés » [2] “Le HCR appelle à une action décisive pour mettre fin aux conditions alarmantes dans les îles de la mer Égée”,https://www.unhcr.org/fr/news/briefing/2020/2/5e3d574ba/hcr-appelle-action-decisive-mettre-fin-conditions-alarmantes-iles-mer-egee.html [3] Enfants migrants non accompagnés se trouvant sur les îles grecques [4] Grèce: relocalisation de 16 migrants mineurs non accompagnés en France [5] “Grèce : Exploitation sexuelle des enfants réfugiés” https://www.france24.com/es/20190716-grecia-explotacion-sexual-menores-refugiados [6] Le Luxembourg a accueilli 12 premiers mineurs isolés en provenance des camps grecs [7] Première relocalisation en France de 16 mineurs non accompagnés vivant en Grèce [8] Mineurs non accompagnés [9] Combien y a-t-il de mineurs isolés aujourd'hui en France ? [10] Exclus et traumatisés : la situation des mineurs non accompagnés en France

 
 
 

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